vendredi, février 15, 2008

L'Oreille est dans le zaziecoin

Un membre du Zazieweb (fameuse communauté de "e-lecteurs") s'est fendu d'une critique de L'Oreille en coin, une radio dans la radio. Et plutôt que d'en faire ici des tartines (de remerciements), je la reproduis partiellement avec un lien vers le texte complet en fin de paragraphe. Ça fait plaisir d'être ainsi lu !


"Je crois que je suis un veinard car si j'ai beaucoup regardé la télé, j'ai au moins autant passé de temps collé à un poste de radio et branché sur France Inter en particulier. Je ne sais plus à partir de quand j'ai écouté régulièrement "L'oreille en coin" mais une fois découvert, je n'ai plus décroché.

Il y a quelques émissions dans l'émission qui ne m'ont laissé aucun souvenir (comme JJMS ou "Les malheurs de Muller", qui n'avaient pas l'air de voler bien haut) mais sinon, j'étais accroc aux voix de Claude Dominique, Kriss Graffiti, Daniel Mermet, Robert Arnaud, Gérard Sire...

Car "L'oreille", c'était d'abord des voix, des sons, des couleurs ambiantes, souvent magnifiquement mis en onde par le grand Yann Paranthoën. Ce n'étaient pas de simples "animateurs" mais de véritables conteurs-passeurs. Des griots.A la tête de cette émission, Jean Garretto et Pierre Codou, un duo très inventif qui avait déjà lancé quelques opérations culottées dès les débuts de la Maison de la Radio et qui va couver avec amour une troupe de jeunots aussi turbulents que créatifs. Ce n'est pas sans rappeller l'aventure du journal Pilote chapeautée par Goscinny et Charlier dont "L'oreille en coin" aurait pu détourner le slogan avec "une radio qui s'amuse à réfléchir".

Au-dessus d'eux, un autre grand personnage de la radio jouera un rôle primordial : Roland Dhordain. Si il prit ses fonctions alors que l'émission existait déjà, il donna carte blanche aux deux producteurs. Le nom de Dhordain rappellera sans doute de bons souvenirs aux anciens auditeurs des émissions animées par Claude Villers. Jean Garretto et Pierre Codou (duo prématurément défait à la mort de Codou en 1981) furent comme Laurel & Hardy, Tintin & Haddock, Roux & Combaluzier. Très dissemblables et merveilleusement complémentaires. Le fils de paysan cévénol, bon vivant et chaleureux (Codou) et le marquis (?) italien, plus secret, parfois intimidant (Garretto). Tous deux obtinrent de concocter les émissions des week-ends sans avoir à rendre de compte à la hiérarchie, d'où l'expression "une radio dans la radio".

Avant d'avoir son titre définitif, "L'oreille en coin" s'est d'abord appellé "TSF 68" puis 69, 70, 71 et c'est vraiment à partir de 1971 qu'elle pris un rythme de croisière jamais tranquille. Car l'une des idées de Codou et Garretto fut justement d'éviter le ron-ron et si ils étaient sur le service public, pas question de s'encrasser dans les acquis. Ils feront tourner les animateurs, non pour les mettre en danger (bien au contraire, ils les paternaient affectueusement) mais pour donner plus de pep's.

Cela n'empêchera pas - enfin, de mon point de vue - que la partie "Oreille du dimanche matin" finira par ronronner. J'en avais déjà conscience à l'époque et aujourd'hui, je trouve que c'est la seule partie du week-end oreillard qui a mal vieilli avec ses invités politiques qui apprirent très vite à jouer les bons camarades de comptoir et à se présenter sous un jour agréable en amenant les produits de leurs départements sous les piques assez tendres des (sympathiques) chansonniers Horgues, Mailhot et consorts. Mais il est vrai que cette partie était liée à l'actualité donc moins tournée vers l'évasion et que son humour était nettement plus classe que ce qui s'entendait sur les autres radios où sévissaient Pierre Péchin et Philippe Bouvard. Dans les années 80, "Le tribunal des flagrants délires" de Villers, Desproges et Rego renouvellera le style. "L'oreille du dimanche matin" verra passer dans son équipe quelques petits jeunes prometteurs comme les frères Jolivet et Alain Chabat.

Mon pied auditif, je l'ai surtout pris les samedis et dimanches après-midi avec les récits africains de Robert Arnaut, les contes gourmands de Gérard Sire, le rayon de soleil Kriss Graffiti et son compagnon-complice Emmanuel Den (un duo flower-power qui entra dans l'équipe grâce à... Max Favalleli ! Comme quoi tous les vieux ne sont pas des vieux cons) et puis Mermet, Agnès Gribes, Katia David...

Chaque semaine, un plaisir renouvelé car ce n'était jamais la répétition de la précédente. Et puis quelle "mise en onde" novatrice, aux montages toujours surprenants, aux choix musicaux magiques ! Par la faute de Paranthoën et de son équipe, j'aurai beaucoup fait souffrir le lourd magnétophone hi-fi de mes parents (un Grundig TK 246, modèle 1970 qui ne résista pas aux changements de vitesses et aux inversions de bande) puis joué les tout petits reporters avec un mini-K7."

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vendredi, février 08, 2008

De l'art et du bon vieux son

Et c'était comme si le livre avait créé une communauté invisible... Voilà des nouvelles de deux de ses membres.

D'abord, toi, internaute-lecteur, te voilà vivement engagé à visiter l'exposition de Vincent Labaume, à la galerie Loevenbruck. Elle s'intitule "Antéclips" (ce titre fait référence à une série d'émissions de Claude Dominique), elle court jusqu'au 18 mars. Essaye de la rattraper. Cela se passe à la galerie Loevenbruck à Paris, eh oui, toujours Paris. Rue de l'échaudé, qui, en l'occurrence, porte bien son nom.
En attendant, lis donc l'interview de VL dans le dernier Technikart. Une maigrichonne colonne, mais il réussit à y glisser une citation de Cavanna : "Quand on aime, on a toujours 20 ans. Mais quand on se branle, on en a toujours 12". Beau programme.

Vincent Labaume, L’histoire nu (extrait), 2007. Collage sur carton ; 25 x 30,9 cm.


Et puis j'ai échangé avant-hier quelques mots avec Florence Dartois, qui m'avait (énormément) aidé dans mes recherches sonores à l'INA. Elle travaille en ce moment sur mai 68, pour les événements radio qui se profilent (comme on peut s'en douter, puisque les journaux, les magazines, la télé, l'édition, les expos, les musées, les colloques, les sites... préparent l'anniv', pourquoi pas la radio, hein ?).

Il était communément admis, jusqu'à maintenant, que les archives sonores de la radio publique (la radio d'Etat) concernant mai 68 étaient pauvres, voire inexistantes, du fait de la grève suivie par les personnels de l'ORTF à cette époque. Eh bien les recherches de Florence Dartois, minutieuses et précises, repartant de la matière, battent en brèche cette légende. Il y a du son jusqu'au 4 juin ! Avec des notices d'archives parfois lacunaires, mais le travail de FD est en train de corriger tout ça. "Certains reporters prennent quasiment fait et cause pour les étudiants", m'a dit Florence. "A un moment donné, ils n'ont plus de moyens techniques, l'Etat confisque les voitures de la radio. Alors ils font des reportages par téléphone, ils s'installent chez des particulier, dans le Quartier Latin. Ils tendent leur micro par les balcons pour avoir le bruit des manifestations... Par hasard, j'ai même rencontré un ancien reporter, qui a été renvoyé de la radio après les 'événements'. Il venait d'être embauché deux mois avant. Jacqueline Baudrier [rédactrice-en-chef des journaux parlés de l'ORTF] l'a convoqué et, avant de lui montrer la porte, lui a lancé : 'Vous nous avez beaucoup déçus' !"
A suivre donc, vraisemblablement, pas mal de sons inédits dans quelques semaines, sur Inter et sur Culture...